Mutuelles de santé (Afrique Subsaharienne)

Contexte d’émergence des mutuelles de santé

Une large part des populations d’Afrique subsaharienne vit actuellement dans un contexte d’extrême pauvreté et souffre de graves problèmes sanitaires. Durant la période coloniale, les soins de santé étaient largement subventionnés par l’Etat. Mais depuis l’Initiative de Bamako [1], en 1987, ils relèvent de la participation financière des usagers dans une logique de recouvrement des coûts. Ce retrait du secteur public dans le financement de la santé a eu d’importantes conséquences pour les populations, en particulier celles du secteur informel. En outre, l’insuffisance ou l’inaccessibilité des marchés assurantiels privés empêchent nombre d’individus de bénéficier d’une couverture contre le risque maladie. Privées de protection sociale, ces populations se voient souvent dans l’incapacité financière d’accéder à des soins de santé de qualité. Face à ces difficultés, on voit émerger, depuis une vingtaine d’années, des systèmes de micro-assurance santé en Afrique subsaharienne. Leur principal objectif étant d’améliorer l’accès des populations démunies aux soins de santé, ils peuvent constituer une alternative pertinente pour les personnes ne bénéficiant d’aucune protection sociale.

Qu’est-ce qu’une mutuelle de santé ?

Il existe une grande diversité d’initiatives désignées par le terme générique de « micro-assurance santé ». Cette diversité tient notamment à la variété des acteurs, aux choix organisationnels et aux mécanismes opérationnels. Parmi la diversité de ces initiatives, les mutuelles de santé constituent l’une des formes les plus abouties et les plus développées en Afrique subsaharienne.

Le BIT/STEP (2000) définit la mutuelle de santé comme « une association à but non lucratif, basée sur les principes de solidarité et d’entraide entre les personnes physiques qui y adhèrent de façon libre et volontaire ».

Ainsi, une mutuelle de santé est une organisation à but non lucratif. Elle fonctionne sur base d’un mécanisme de partage des risques et de mise en commun des ressources. Contrairement aux assurances privées, les mutuelles de santé n’opèrent aucune sélection des membres liée au risque individuel. L’adhésion y est volontaire. Ce type d’organisation promeut également la prise de décision participative et la démocratie. Grâce aux cotisations des membres, la mutuelle de santé vise avant tout à garantir le paiement ou le remboursement d’une partie ou de la totalité des frais des soins de santé, en accord avec les contrats négociés avec les prestataires. La mutuelle de santé facilite donc l’accès aux soins de santé à travers la solidarité.

Dans la plupart de ces organisations, les membres partagent certaines caractéristiques telles que l’appartenance à un même village ou à une même aire géographique, la participation à une même organisation ou l’emploi dans une même entreprise. L’adhésion étant volontaire, la mutuelle de santé doit veiller à rassembler un nombre suffisant d’adhérents afin d’assurer sa viabilité.

Les défis des mutuelles de santé

Néanmoins, nombre de ces initiatives demeurent au stade expérimental et rencontrent une multitude d’obstacles à leur développement. Ceci tient à différents problèmes et contraintes auxquels ces organisations doivent faire face. Tout d’abord, les mutuelles de santé n’atteignent souvent que de faibles taux d’adhésion (généralement au-deçà de 1 000 personnes), notamment en raison du manque de moyens financiers des communautés, de la mauvaise qualité des soins de santé délivrés, ou de l’introduction récente du mécanisme dans la région. Ces initiatives peuvent également rencontrer des problèmes dans le recouvrement des cotisations dus à la précarité et à l’irrégularité des revenus d’une part, et à la périodicité et aux modes de collecte de ces cotisations d’autre part. Ces primes sont relativement basses afin de toucher un public le plus large possible, ce qui limite le développement des mutuelles. Enfin, d’autres difficultés concernant, par exemple, la gestion technique, financière et administrative de l’organisation, la contractualisation avec les prestataires de soins, la surconsommation de prestations médicales ou la sélection adverse des risques peuvent aussi apparaître. Ces différents éléments permettent d’expliquer le faible degré de fonctionnalité de certaines mutuelles de santé à l’heure actuelle.

Références :

  • bit/step (2000), Micro-assurance santé. Guide d’introduction aux mutuelles de santé en Afrique, Organisation internationale du Travail, Genève.
  • Defourny, J. et Failon, J. (2008), « The development of the community-based health insurance schemes in sub-Saharan Africa : which factors really induce the membership ? », paper presented at the 8th International Conference for Third Sector Research, University of Barcelona, July 9-12 2008, submitted for publication to Health Policy.
  • Defourny, J., Failon, J., Sarambe, I. (2008), « Les approches de l’économie sociale et solidaire face aux mutuelles de santé en Afrique », Centre d’Economie Sociale, Université de Liège, soumis pour publication à la Revue Tiers Monde (Paris).
  • Fonteneau, B. (2003), Les défis des politiques de micro-assurance santé en Afrique de l’Ouest. Cadre politique, environnement institutionnel, fonctionnement et viabilité, Hoger Instituut voor de arbeid, Leuven.
  • Fonteneau, B. et Galland, B. (2006), « The community-based model : mutual health organizations in Africa », in Protecting the poor. A microinsurance compendium, ILO, Munich
  • Waelkens, M.-P., Criel, B. (2004), Les mutuelles de santé en Afrique subsaharienne. Etat des lieux et réflexions sur un agenda de recherche, HNP Discussion Paper, Banque Mondiale, Washington DC.
2018-04-04T14:08:20+00:00 décembre 20th, 2017|