Entreprise de travail adapté (ETA)

Origine des ETA

Au lendemain de la seconde guerre mondiale, la préoccupation d’intégrer les personnes handicapées et moins valides dans les circuits socio-économiques classiques se fait sentir à travers l’Europe. En Belgique, il faut cependant attendre la fin des années 50 pour que naissent d’abord sur papier, ensuite sur le terrain, les premiers « ateliers protégés », ancienne dénomination des Entreprises de Travail Adapté (ETA). Ceux-ci ont pour vocation d’offrir un travail rémunéré aux personnes handicapées, et ils ont initialement été conçus comme des tremplins vers une vie professionnelle classique, bien que ce second objectif ait été rarement atteint.

La question de l’intégration socioprofessionnelle des personnes handicapées était à l’origine réglementée par les autorités fédérales. Ainsi, la loi du 28 avril 1958 relative à la formation, à la réadaptation professionnelle et au reclassement social des handicapés prévoit les premières mesures et donne naissance sur papier aux ateliers protégés (beschutte werkplaatsen en néerlandais). Les premiers ateliers protégés sont agréés en 1964; ils ont été pour la plupart créés au début des années 1960 à l’initiative d’associations de parents d’enfants handicapés.

Les lois spéciales des années 1980 ont ensuite progressivement confié aux Communautés, puis aux Régions, les compétences relatives à l’intégration socioprofessionnelle des handicapés. S’en est notamment suivie la création de fonds communautaires qui ont chacun repris la mission de l’ancien Fonds national. Par la suite, certaines compétences ont été transmises aux Régions, et différents organes sont nés : l’Agence Wallonne pour l’Intégration des Personnes Handicapées (AWIPH), le Service Bruxellois Francophone pour Personnes Handicapées (SBFPH) et la Vlaams Agentschap voor Personen met een Handicap (VAPH). En 1995, les ateliers protégés à Bruxelles et en Wallonie ont subi un changement d’appellation pour être désormais désignés sous le vocable d' »entreprise de travail adapté ».

Qu’est-ce qu’une ETA?

Les ETA appartiennent au secteur de l’insertion au sens large. Leur particularité est d’offrir un emploi stable et durable à des travailleurs handicapés, auxquels elles procurent un statut social et une certaine sécurité d’emploi garantie par un contrat de travail, un niveau de salaire minimum et des conditions de travail adaptées (répartition particulière des tâches, rythme de travail approprié). Les ETA bénéficient d’une intervention importante des pouvoirs publics pour compenser la perte de rentabilité afférente à l’emploi de personnes handicapées. Cette politique de subsidiation publique vise notamment à favoriser le maintien à l’emploi des personnes les plus handicapées. C’est pourquoi elle prévoit que les travailleurs soient subsidiés à des degrés différents en fonction de la gravité de leur déficience ou de leur incapacité.

Les ETA doivent être des personnes morales ou organisées par une personne morale pour être agréées et bénéficier de subsides. Elles sont généralement constituées en association sans but lucratif (ASBL) et offrent deux types d’emploi : les postes de production et les postes d’encadrement et de gestion de l’entreprise. La proportion entre travailleurs handicapés et travailleurs valides y est très différente, et l’on retrouve en majorité des personnes handicapées en production et des personnes valides dans les postes d’encadrement. Les ETA doivent accueillir en priorité et selon un pourcentage minimum des personnes reconnues handicapées par les institutions compétentes (AWIPH,…).

Le secteur des ETA est caractérisé par une grande diversité en termes de taille, d’activité, de niveau de production, de pratiques sociales,…, mais cette diversité tend à s’amoindrir du fait des fusions et synergies entre ETA de plus en plus fréquentes. De manière non exhaustive, les ETA prennent en charge les activités suivantes : agriculture, artisanat et textile, manutention, nettoyage, restauration, conditionnement, travail du bois, horticulture et jardinage, paletterie, électronique, câblage, mécano-soudure, mailing, imprimerie, bureautique, etc. Leurs activités se mettent en place selon trois schémas couramment observés : certaines ETA concluent des contrats de sous-traitance avec des entreprises privées; d’autres travaillent pour leur propre compte et gèrent dès lors l’ensemble du processus de production, de la conception à la commercialisation; d’autres enfin combinent ces deux formes.

Les ETA en chiffres

Des statistiques sur les ETA sont disponibles pour chaque Région. En Wallonie, l’EWETA (Entente Wallonne des Entreprises de Travail Adapté) recense 58 ETA agréées et subventionnées par l’AWIPH en 2007, occupant au 30 juin 2006 quelques 7 975 travailleurs dont près de 84% disposant d’un contrat à durée indéterminée. Parmi ces quelques 8 000 travailleurs, plus de 85% sont des personnes handicapées présentant pour la plupart un handicap mental ou assimilé. Près de 86% occupent des postes de production tandis que les 14% restant se partagent les postes d’encadrement (dont seulement 18% sont des travailleurs handicapés). La tranche d’âge 30-49 ans est la plus représentée : elle totalise près de 65% des travailleurs. Le chiffre d’affaires total des ETA en 2004 s’élevait à plus de 143 millions d’euros tandis que celles-ci ont bénéficié de près de 70 millions de subventions diverses pour l’exercice 2004.

A Bruxelles, l’étude de B. De Backer recensait quatorze ETA agréées en 2005, occupant 1 795 travailleurs, dont près de 80% de travailleurs handicapés. A nouveau, la tranche d’âge la plus représentée est la tranche des 30 à 49 ans, qui totalise près de 65% des travailleurs.

A titre de comparaison, relevons qu’en Flandre, la Vlaamse Federatie van Beschutte Werkplaatsen recense plus de 17 300 travailleurs dans les beschutte werkplaatsen. En 2003, ces travailleurs se répartissaient de la manière suivante : 82% étaient des personnes handicapées, 96% disposaient d’un contrat à durée indéterminée et 87% étaient des travailleurs assignés à des tâches de production (les 13% restant occupant des postes d’encadrement, dont un cinquième pour des personnes handicapées).

Les défis actuels des ETA

Le principal défi des ETA reste à l’heure actuelle la nécessité de concilier les objectifs sociaux de promotion sociale et d’intégration par le travail des handicapés avec les contraintes économiques de rentabilité, de qualité, de respect des délais de production,… qui deviennent des critères décisifs de viabilité organisationnelle. La mission sociale d’une part, la nécessaire professionnalisation du secteur d’autre part font de l’entreprise de travail adapté une entité qui se doit de jouer simultanément sur ces deux tableaux, afin de valoriser tant la production de biens et services via un travail adapté à l‘individu que la revalidation et le reclassement des personnes handicapées. La recherche constante de nouveaux marchés, de nouvelles activités compétitives et rentables et de nouveaux partenariats avec d’autres entreprises, peuvent constituer quelques pistes pour assurer le succès commercial des ETA.

Sites :

Références :

  • AWIPH (2006), Les entreprises de travail adapté en Région Wallonne, 13ème édition, Charleroi
  • De Backer, B. (2005), Des entreprises pour travailleurs handicapés à Bruxelles. Réalités, défis et perspectives.
  • Delvaux, J., et L. Biron (2007), « Entreprises de travail adapté – Des entreprises pas comme les autres! », En Marche, 18 octobre 2007, p. 8-9
  • Morenville, C. (2002), « ETA, le difficile équilibre entre le social et l’économique », Traverses, n°171, septembre 2002
2018-04-04T14:08:20+00:00 décembre 20th, 2017|